Hier, je parlais du scandale du bridage de l’iPhone X.
Et un lecteur, Lemst, commençait son commentaire ainsi:
C’est bien beau de s’émouvoir de cette pratique détestable d’Apple qui prend ses clients pour des vaches à lait, mais, et après? À part faire comme tout le monde en les critiquant, que fais-tu de concret, Cuk?
C’est un peu dommage de balancer un «?mon iPhone X chéri?» en plein milieu. Ça veut dire quoi, que t’es pas content qu’ils fassent ça, mais pour rien au monde tu ne prendrais autre chose qu’un iPhone? L’expression «?pisser dans un violon?» prend tout son sens…
et il le terminait ainsi:
Au final, ma réaction: ils n’auront plus mon argent. Et toi, Cuk, que fais-tu de concret contre ça?
Évidemment…
Je me rends bien compte que, sur le fond, Lemst a raison.
Je m’offusque ici, et j’achèterai pourtant certainement l’iPhone 11.
Bon.
Reprenons.
Un petit peu d’histoire personnelle
Je suis sur des systèmes Apple depuis 1991.
Auparavant, 1 an de PC, avec participation au développement de Windows (s’appelait-il comme ça à l’époque, pas encore, mais c’est bien de lui qu’il s’agit) en tant que betatesteur, également avec le développement des premières souris en Suisse, à la Vallée de Joux.
Puis 3 ou 4 ans avec des Atari que j’appréciais beaucoup.
Pour vous dire, à cette époque, les gens qui étaient sur Mac, j’avais l’impression qu’ils se la pétaient grave, et je n’appréciais pas vraiment leur attitude.
Vu de l’extérieur, au début des années 90, Apple était un peu comme une secte avec un gourou.
Parce que j’avais besoin d’Omnipage qui n’existait pas sur Atari et qu’il n’y avait aucune alternative sur ce système, je suis venu à Apple, avec un Mac SI, que beaucoup surnommaient Mac Sans Issue.
Et puis je ne suis plus jamais parti.
Je ne sais pas pourquoi, j’ai tout de suite croché et j’ai adoré travailler avec du matériel pommé, même s’il y a 20 ans, il était souvent difficile de trouver des programmes dans certains domaines, programmes que l’on trouvait si facilement sous Windows.
Il y a eu des périodes très dures, des moments où franchement, je pensais faire le grand saut vers le système de Microsoft.
Ces moments où, lorsqu’un journal disait du bien d’Apple et ne prédisait pour une fois pas sa mort, j’étais tout content, et tous mes amis sous Mac l’étaient tout autant.
Les années fastes pour la marque sont arrivées, avec les doutes sur les options prises, notamment de mettre le paquet sur l’iPod d’abord, puis sur les iPhone et les iPad, souvent, nous semblait-il, au détriment du Mac.
Le pari a pourtant réussi.
Apple a grandi, le nombre d’utilisateurs aussi.
De la petite entreprise différente, il ne reste bientôt plus que les jeans, Apple est rentrée dans le rang, et pense souvent à ses actionnaires avant ses utilisateurs, ce qui est tout de même un peu regrettable.
Il y a également ces histoires fiscales, notamment en Irlande, qui ne sont pas à son honneur même si d’autres ont fait pareil.
Des contradictions, plein la caboche
Je crois ne pas être un monstre, et pourtant, je me rends bien compte que ma manière de consommer de l’Apple ou de la pomme si vous préférez est en contradiction totale avec mes opinions politiques et ma vision plutôt écologique et bio (sur ce dernier point particulier depuis quelques mois, merci Madame K) de la vie.
Je suis souvent révolté par les multinationales, par ces entreprises qui veulent être toujours plus puissantes, souvent au détriment de la nature et de la durabilité.
Apple n’est certainement pas pire qu’une autre, mais elle n’est pas meilleure, et ça, voyez-vous, ça m’embête.
Avec la capitalisation boursière qu’elle peut mettre en avant, il me semble qu’elle aurait les moyens de montrer l’exemple.
Elle le fait, sur certains points, sur certains emballages, depuis longtemps.
Mais pas assez.
Peut-être suffirait-il parfois de changer certains détails, comme cette course à la finesse qui impose des batteries qui ne tiennent pas le coup, et qui rendent irréparables nos petits appareils.
Je suis conscient de tout ça.
Et pourtant, je ne sais pas pourquoi, alors que j’ai changé au moins trois fois de banque dans ma vie parce que je voulais montrer que je ne soutenais pas leur politique (pensez au Crédit Suisse et à son soutien de l’Apartheid dans les années 70-80, pour ne prendre que cet exemple), eh bien je pardonne beaucoup plus facilement à Apple.
J’ai de la peine à comprendre mon fonctionnement, c’est comme ça.
J’ai pu changer 20 fois de marque en photographie (avec des aller-retour hein!), sans le moindre regret ou petit pincement au cœur.
Apple, je ne peux pas l’abandonner.
Le Blog du Cuk, une des raisons de me donner bonne conscience?
Je dis souvent que oui, bon, d’accord, c’est vrai que je change d’iPhone chaque année (je ne jette pas les anciens, bien sûr, au moins 4 tournent encore à cette heure), mais j’ai une raison de le faire: je me dois d’être tout de même un peu au top pour tenir un blog comme celui-là ou comme le précédent Cuk.ch.
Que c’est presque comme un deuxième métier, en tout cas au niveau du temps consacré quotidiennement, et qu’en plus je suis responsable informatique de mon établissement.
Alors bon…
Il faut que je sache de quoi je parle.
Oui, mais non.
Parce que si je voulais, je n’achèterais plus rien et je pourrais tenir le Blog du Cuk, le blog d’un gars qui décide de s’en tenir à ce qu’il a et de choisir clairement la décroissance.
Là, je pourrais être cohérent, me gausser des gens comme moi qui n’ont rien compris à rien, parce que si l’on continue comme ça, on va dans le mur.
Et pourtant, je ne le fais pas.
En conclusion
Lemst, pour répondre à ta question le plus sincèrement possible: je ne ferai rien de concret pour montrer mon mécontentement suite à l’article d’hier.
Si en fait: comme le dit Mirou en commentaires, je dis, j’écris mon mécontentement.
D’ailleurs, et c’est ça qui me soulage un peu: j’ai toujours dit haut et fort et souvent quand je n’étais pas d’accord avec Apple, au point de me faire traiter de traître à la cause (non, mais vous vous rendez compte où on en était il y a 15 ans…).
Mon témoignage, mes témoignages, associés avec des dizaines de milliers d’autres, contribuent à nos petits niveaux à changer les choses.
Parce que ce scandale d’iOS 11, je suis persuadé que plus on en parle, plus la gifle sera immense pour Apple, et qu’elle sera obligée de s’en souvenir.
Il y a tout de même des gens un peu sensés à sa tête.
Ils vont apprendre de leurs erreurs.
Ah… parce que oui, en plus de tout ce que je vous ai confessé plus haut, je suis un fieffé optimiste.