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La 2b company explique qu’elle ne prendra notamment plus l’avion

Je vous ai à plusieurs reprises parlé de la 2b company, notamment ici et .

C’est une compagnie théâtrale inventive, d’une intelligence et d’une finesse absolues.

Chacun de leurs spectacles est un délice, et l’équipe est internationalement reconnue.

Vous connaissez bien Mirou si vous lisez les commentaires de ce blog, peut-être un peu moins Coacoa, qui commentait plus particulièrement sur Cuk.ch, un peu moins ici.

Ce sont deux piliers de 2b company.

Mais si je vous parle d’eux ce jour, c’est parce que dans leur dernière newsletter, ils nous expliquent ce qui suit.

Cher François,

Le sixième rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) est sans appel: sans un renforcement drastique et immédiat des politiques actuelles, le monde se dirige vers un réchauffement de +3,2 degrés d’ici la fin du siècle, alors que chaque dixième de degré supplémentaire provoque son lot de catastrophes climatiques.

Pour tenter de limiter l’ampleur du désastre probable, il faudrait que les émissions de gaz à effet de serre dans tous les secteurs atteignent leur pic avant 2025, et diminuent de près de la moitié d’ici 2030 par rapport à 2019.

Comme l’écrit le GIEC, la réponse doit avant tout être politique, avec des régulations fortes à tous les niveaux sur le plan international.

En attendant, devant l’inadéquation entre l’urgence absolue de la situation et les (in)actions gouvernementales, nous ne pouvons, à notre modeste endroit, que prendre de dérisoires, mais néanmoins concrètes mesures afin de limiter notre impact.

Ainsi, tandis que nous avons l’immense honneur de voir certains de nos spectacles invités à être montrés hors d’Europe, afin de clarifier notre position auprès des structures partenaires et de nos collaborateur·trice·s, nous voulons – comme d’autres avant nous – officialiser notre décision de ne plus voyager en avion.

«Oui, mais l’avion n’est pas LE problème» ne cesse-t-on de relativiser.

C’est vrai. Il en est un parmi beaucoup d’autres.

Un sur lequel – parmi beaucoup d’autres – nous pouvons, en notre qualité de responsables, agir concrètement.

François-Marie Bréon, physicien-climatologue et auteur du cinquième rapport du GIEC, rappelait en audience à l’Assemblée nationale française en juillet 2019 :

 «Je pense que l’immense majorité des gens ne se rend pas compte de ce que veut dire aller à la neutralité carbone, voire diminuer par 4 nos émissions. (…) Il est évident que dans une France qui aura divisé ses émissions de gaz à effet de serre par 4, il n’y aura plus d’avion – on ne peut pas y arriver si on conserve le transport aérien. De nombreuses questions de ce type se posent. Le fait qu’il y ait encore ce genre de débats montre bien que l’on n’a pas réalisé ce que veut dire diviser par 4 les émissions de gaz à effet de serre.»

Si nous voulons véritablement et sérieusement atteindre les objectifs que les spécialistes nous adjurent d’adopter sous peine de disparition du vivant (oui, oui, de DIS-PA-RI-TION DU VI-VANT), il nous semble intenable, irrationnel et irresponsable de continuer à relativiser certaines décisions que nous pouvons prendre.

Toutefois, pour paraphraser Aurélien Barrau, s’il nous semble urgent de participer à la nécessaire décroissance de notre prédation mortifère sur les écosystèmes, «que l’amour, la créativité, la solidarité, la connaissance, l’appétence, la recherche scientifique, l’exploration artistique croissent… mais évidemment!».

Aussi, persuadé·e·s que l’art et les idées doivent continuer à circuler malgré tout, et conscient·e·s que les contraintes sont avant tout le point de départ de nouveaux possibles, nous réfléchissons à de nouvelles manières de mettre certains de nos travaux en partage.

Nous ne nous posons ni en juges ni en modèles. Nous ne prétendons pas faire juste ou bien, mais en notre âme et conscience.

Nous nous savons souvent incohérents, fréquemment inconséquents et constamment perfectibles. Toutefois, comme d’autres qui nous inspirent, nous essayons de prendre quelques-uns des engagements que nos convictions exigent.

Ne plus prendre l’avion – parmi d’autres – est notamment l’un d’entre eux.

Pour la 2b company,

François Gremaud – Direction artistique
Michaël Monney – Direction administrative, diffusion
Noémie Doutreleau – Production et administration
Stéphane Gattoni – Direction technique

courriel de la 2bCompany

Chapeau Madame,

Chapeau Messieurs.

En ce qui me concerne, j’ai aussi décidé de ne plus prendre l’avion.

Mais pour moi, cela signifie simplement aller moins loin, profiter des trains pour visiter l’Europe.

Pour vous, c’est tout autre chose.

J’imagine ce que cela signifie pour vous qui devriez vous déplacer, comme vous le dites, hors Europe, pour porter partout votre art magnifique.

Entre autres choses vous réinventer, et je vous trouve remarquables et courageux, exemplaires, tout en évitant de donner des leçons.

Je vous admire, vous me touchez, je vous aime.

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