Je sais, j’ai un devoir de réserve à propos de tout ce qui émane de l’officialité de mon canton de Vaud, mais là, tout de même, il faut que je vous raconte.
Donc, comme je l’écrivais l’autre jour, Madame K et moi-même nous sommes mariés devant l’Etat civil mercredi passé.
Je pensais en rester là, et ne plus vous en parler, on n’est pas non plus sur Instagram ou Facebook, ici.
Et pourtant, il faut tout de même que je vous raconte.
Nous avons tous (je crois) passé un très bon moment dans un chouette restaurant à Morges, Invivo, réputé pour sa cuisine italienne, que nous avions privatisé pour l’occasion, puisque nous étions tout de même 37 en nous limitant strictement aux frères, sœurs, parents et enfants.
Ce restaurant est tenu patron super, son personnel l’étant tout autant, et se trouve être situé dans la maison d’Igor, parce qu’Igor Stravinsky y a vécu pendant deux années.
Oui, ça me fait plaisir, voyez-vous, de leur faire un peu de publicité ici.
Mais avant ce repas et cet après-midi vraiment chaleureux qui nous ont fait tellement plaisir, il y avait notre mariage officiel, comme je le disais, et c’est lui dont j’aimerais m’entretenir ici.
Revenons dix mois plus tôt: nous remplissons nos démarches de demande de mariage en mai.
En novembre, le 17, nous recevons l’heureuse et romantique nouvelle suivante (extrait long):
… Dès lors, nous avons le plaisir de vous convoquer pour effectuer la procédure préparatoire de mariage le 30 mars 2022 à10h30 précises dans nos bureaux, Rue Caroline 2,1014 Lausanne.
Il s’agit là de la première date disponible. Si cela ne vous convient pas, nous vous laissons le soin de nous le faire savoir par courriel.
Ces formalités de la procédure préparatoire de mariage pourront s’effectuer uniquement sur présentation des originaux de vos passeports ou cartes d’identité.
Les frais et les émoluments d’environ frs. 275.- devront être réglés soit en espèces, soit au moyen d’une carte EC-direct /Maestro, Postcard, Visa ou MasterCard.
À l’occasion de notre rencontre et si les formalités sont closes, nous pourrons célébrer votre mariage, à l’office, en présence de vos témoins et des éventuels interprètes uniquement.
Bon, l’administration, c’est l’administration n’est-ce pas, donc on ne s’attendait pas non plus à une chaleur extrême de leur part.
Cela étant, attendre 10 mois pour n’avoir ni le choix de l’endroit, ni le choix de la date, à moins de reporter encore la cérémonie (pour quelques mois?), c’est tout de même un peu fort de café.
Et puis, 275 francs pour la prestation à laquelle nous avons eu droit, c’est pour le moins étonnant.
Je vous explique…
Normalement, dans le canton de Vaud, quand on se marie, on a le choix de l’endroit où l’on veut se marier, et de la date. de la cérémonie
L’Officier d’Etat civil qui nous marie reçoit la famille et les futurs mariés, souvent accompagnés par pas leurs amis; il fait un petit discours officiel d’une petite dizaine de minutes, en habit d’apparat, parce que voyez-vous, se marier, c’est tout de même quelque chose d’important que l’on ne fait pas forcément souvent dans la vie.
Nous, nous arrivons dans un lieu qu’on nous a imposé à la date qui l’était tout autant, avec nos témoins et l’époux de celle de Mme K, et l’épouse du mien que vous connaissez certainement si vous lisez les commentaires (mon témoin, pas son épouse), à savoir Caplan.
Que nenni que nenni! Impossible, pas la place…
Bon… on savait hein, c’était écrit dans la lettre, on a essayé, mais… pas la place voyez-vous, comme je vous le disais au paragraphe précédent, même si, en imaginant que nous ne soyons pas de langue française, il y en aurait eu pour les interprètes (voir la lettre citée plus haut), alors pourquoi, puisque nous n’en avions pas besoin, ne pas accepter nos deux amis?
Cela dit, en effet, de la place, il n’y en a pas: on nous fait attendre un peu, mais il est clair que nous gênons au milieu du couloir (d’ailleurs on nous le fait remarquer), sur le passage de tous ceux qui bossent et passent d’un bureau à l’autre, parce que dans la salle d’attente, il n’y a pas assez de chaises pour nous, les témoins du mariage précédents étant encore dans la place.
On attend donc, et puis on nous fait entrer, juste Madame K et moi-même, dans un bureau minuscule pour faire remplir les papiers officiels avec l’Officier d’Etat civil, une femme très sympathique, soit dit en passant.
C’est là qu’une autre dame entre dans le bureau, s’assied en face de l’officier d’Etat civil devant son écran et commence à travailler pour elle, à quelques centimètres de moi.
En plus, l’Officier d’Etat civil qui remplit nos papiers nous explique que nous tombons en plein pendant une panne informatique générale qui touche le registre d’Etat civil de la Confédération.
Pas de bol, il faut tout rentrer à la main, enfin… pas tout, parce qu’un collaborateur n’a pas eu le temps de faire la mise à jour le matin, quelle chance, il reste UN ordinateur qui fonctionne dans l’office.
Cela étant, une fois nos démarches terminées, nous nous rendons à la caisse pour payer les 275 francs annoncés.
En guise de caisse, un bureau où se trouve l’appareil à cartes bancaires, soit dit en passant rempli de caisse grises de transport (bonjour les conditions de travail), nous à côté de la destructrice de papier qui tourne à plein régime.
Quelques minutes plus tard, nous sommes reçus dans une toute petite salle avec une table ovale, la dame Officier de l’Etat civil qui avait rempli les papiers avec nous habillée comme vous et moi quand nous allons au travail nous priant de prendre place.
Bonjour l’officialité de la chose!
C’est là que Madame K éclate de rire, parce que mon témoin, Caplan donc, essaie de prendre place en enjambant des plaques de Plexiglas entassées derrière la table, là où nous étions censés nous trouver nous, les mariés, ainsi que nos deux témoins.
L’Officier d’Etat civil nous lit deux articles de loi rapidement, levez-vous Mesdames Messieurs.
Moi ah bon? Pourquoi, c’est déjà fini?
La dame: mais… vous allez tout de même vous dire oui ou bien?
Moi: ah oui, c’est vrai, excusez-moi!
Ben c’est que j’avais presque oublié qu’il s’agissait d’un mariage, au vu de l’ambiance…
Nous nous passons les alliances, et tchô Berthe, on sort.
Là, Mathieu, mon quart de frère et sa famille nous attendent, mais les seules photos possibles devaient être prises depuis l’autre côté de la route, parce qu’évidemment, la sortie n’était pas prévue pour les mariages, un trottoir étroit bordant le bâtiment de La Caroline 2.
Alors voilà…
Nous, comme ni Mme K ni moi n’en étions à notre premier mariage, on a préféré en rire, et quelque part, ça nous fera un souvenir dont on se souviendra longtemps, tellement cette situation était surréaliste.
Mais pour un jeune couple qui ne rêve que de se marier et dont c’est une première, il faut le dire, les conditions qu’on nous a proposées sont tout simplement lamentables, voire honteuses, pour un canton qui n’a aucun problème de budget depuis des années et des années, et qui aligne les centaines de millions de bénéfices à chaque bouclement de compte.
Oui, franchement, ce qui se passe à l’Etat civil, ces temps, c’est scandaleux.
Rigolo pour nous (quoique… même nous nous réjouissions tout de même de ce moment), certes, mais scandaleux.
Je tiens cependant à être bien clair: je n’en veux pas une minute au personnel qui travaille à La Caroline 2.
Eux-mêmes sont sous pression, ils travaillent dans des conditions pour le moins limites et pour tout dire, je les plains.